Par Jean Claude Rhushangire, Coordonnateur VEDIP
L’accès aux zones de santé de Kimbi Lulenge et Kaniola, au Sud-Kivu, se voit de plus en plus menacé par une combinaison de facteurs, aussi bien infrastructurels que sécuritaires. À l’approche de la saison des pluies, l’état déjà déplorable des routes, notamment la Route Nationale 2 (RN2), rend l’acheminement de l’aide humanitaire encore plus difficile, tandis que la présence persistante de groupes armés ajoute une couche de complexité à cette situation d’urgence.
Infrastructures routières en désuétude
Les routes menant aux zones de santé de Kimbi Lulenge et Kaniola, en particulier la RN2 et la RN5, sont en très mauvais état. Les promesses faites par le Président lors de sa campagne électorale, concernant l’asphaltage de ces voies dans un délai de dix mois, restent pour l’heure non tenues. Avec l’avènement de la saison des pluies, ces routes deviennent quasiment impraticables, isolant encore plus les populations vulnérables.
Il est urgent que les autorités renforcent les équipes en charge des travaux et s’assurent que les engagements pris soient respectés avant que la saison des pluies ne vienne aggraver la situation.
Groupes armés : une menace persistante
Au-delà des infrastructures, les activités humanitaires sont également entravées par la prolifération des groupes armés dans plusieurs zones clés, telles que Luntukulu, Nzibira, et Misisi. Ces groupes, souvent impliqués dans l’exploitation illégale des ressources minières, érigent des barrières payantes qui deviennent un obstacle majeur pour le personnel humanitaire. Ces barrages exigent des paiements illégaux de la part des passants, y compris les travailleurs humanitaires qui cherchent à apporter de l’aide à des populations en détresse.
Une situation alarmante
Dans plusieurs tronçons routiers, des groupes armés comme les Wazalendo ou les forces régulières (FARDC) ont érigé des barrières où les passagers et véhicules doivent payer des taxes illégales. Par exemple, sur le tronçon Nzibira-Kigulube, des motos sont taxées à hauteur de 1 000 francs congolais (fc), tandis que les voitures doivent payer jusqu’à 2 000 fc.
Sur l’axe Uvira-Fizi-Lulimba-Misisi, la situation est similaire, avec des barrières érigées par des commandants autoproclamés tels que René et Mayele, ou encore par les FARDC, où des taxes de 1 000 fc par personne sont exigées.
Ces pratiques illégales perturbent non seulement les déplacements des populations civiles, mais aussi les opérations de secours des organisations humanitaires, qui doivent déployer des ressources supplémentaires pour traverser ces zones.
Conflits coutumiers et insécurité généralisée
À ces obstacles, s’ajoutent les conflits coutumiers qui, dans certaines chefferies comme celle de Nindja, compliquent encore davantage la situation sécuritaire. Les tensions entre héritiers, malgré les efforts des autorités locales, constituent un facteur perturbateur qui retarde les interventions humanitaires cruciales dans ces zones.
Urgence d’une action concertée
Face à cette situation alarmante, il devient impératif de garantir la paix et la sécurité dans ces régions. Les populations locales, particulièrement les femmes et les enfants, se trouvent dans une situation de grande vulnérabilité. Les humanitaires doivent pouvoir accéder librement à ces zones sans être soumis à des barrages illégaux ou des menaces de violence.
Le renforcement des infrastructures et la résolution des conflits par des acteurs nouveaux et neutres apparaissent comme des solutions incontournables pour rétablir un accès humanitaire efficace dans les zones de santé de Kimbi Lulenge et Kaniola.
Les voix de nombreuses organisations humanitaires s’élèvent, appelant à une action rapide et coordonnée de la part des autorités locales et nationales pour mettre fin à cette situation. Il est temps d’agir avant que les conditions ne se détériorent encore plus avec l’arrivée de la saison des pluies.