Plusieurs cas des violences sexuelles ont été enregistrés ces derniers jours dans le groupement de Kalonge en territoire de Kalehe au Sud-Kivu. Caractérisé par une insécurité qui ne dit pas son nom suite à l’activisme des groupes armés, Kalonge assiste à des scènes des violences et c’est surtout les femmes qui en payent les pots cassés.
« Environ 48 cas des viols ont été enregistrés depuis le début de l’année 2021 », selon la société civile locale. Malheureusement suite à la distance à parcourir pour saisir le tribunal compétent, à savoir, le Tribunal de Grande Instance de Kavumu, situé à plus de 50 km de Kalonge, plusieurs survivantes préfèrent garder silence.
Au-delà de l’insécurité qui caractérise ce trajet, des routes sont impraticables et les survivantes n’ont pas des moyens suffisants, dénoncent les acteurs de la société civile de Kalonge.
« Le groupement de Kalonge fait face à une insécurité grandissante ce derniers temps. Quand les groupes armés attaquent, ce sont les femmes qui sont les plus victimes. Nombreuses d’entre elles sont violées. Nous avons enregistré plusieurs cas entre le mois de mai et juin, il y’a eu 4 cas, au-delà des dizaines qui datent depuis janvier. Malheureusement certaines se taisent car elles n’ont pas le moyen pour accéder à la justice. Nous dénonçons cela. Il faut que les audiences foraines se tiennent à Kalonge et que les autorités s’impliquent pour que les victimes des viols accèdent facilement à la justice », fait savoir Monsieur Jean-Baptiste Shasha.
Face à cette situation, des organisations qui militent pour les droits des femmes et l’accès à la justice au Sud-Kivu, haussent également le ton, tout en appelant les autorités à s’impliquer car l’accès à la justice est un des indicateurs de bonne Gouvernance.
« Quitter Kalonge jusqu’à Kavumu, vous vous rendez compte ? La distance, vous devez passer par le parc avec tout ce qu’il y’a comme insécurité. La victime qui devrait recouvrer ses droits, avoir la justice, risque même de perdre sa vie en cours de route ou être doublement victime avant d’atteindre la justice à Kavumu, or les rapprochements de la justice des justiciables, c’est aussi un indicateur de paix, de sécurité et de bonne Gouvernance. Le moyen de transport demande de l’argent, si elle n’a pas d’argent, elle ne pourra pas arriver à Kavumu et ça va créer une sorte de démotivation dans le chef de certaines victimes. Faire parcourir des kilomètres à une victime de violences sexuelles pour atteindre la justice c’est encourager l’impunité », déclare Madame Solange Lwashiga du caucus des femmes pour la paix.
Faute des moyens et autres défis tels que la situation sécuritaire inquiétante, les juges, avocats et autres se retrouvent dans l’impossibilité d’organiser les audiences foraines dans cette partie du territoire de Kalehe
« Les violences sexuelles, c’est une réalité à laquelle nous sommes confrontés. Nous recevons plusieurs cas. Parcourir plus de 50 km pour porter plainte peut porter préjudice. Bien-sûr qu’il y’a une distance importante qui sépare Kalonge du TGI de Kavumu. Mais ça ne se décrète pas comme ça du jour au lendemain, on se lève on se dit nous allons organiser des audiences foraines. Il faut déplacer les juges, magistrats et avocats mais les moyens ne suivent pas toujours. Ce n’est pas que les magistrats ne veulent pas mais ce sont soit des conditions d’ordre logistique, matériel, soit l’insuffisance du personnel, soit les questions sécuritaires qui posent problème. Quitter Kavumu pour aller à Kalonge nécessite des moyens. Lorsqu’il y’a des rebelles, vous n’allez pas demander aux magistrats d’aller organiser une chambre foraine en ce lieu, c’est les exposer. Il faut que ceux qui rendent justice soient aussi sécurisés. Nos agents ont du mal à atteindre toutes les parties, quitter Kavumu pour aller chercher les témoins à Kalonge, c’est aussi une des difficultés auxquelles nous faisons face », révèle Hillaire Ngoie Mwepu, président de la cour d’appel de Bukavu et personne ressource dans la thématique des violences sexuelles au Sud-Kivu.
Pour le ministre provincial de la justice au Sud-Kivu, le Gouvernement congolais travaille bec et ongles et n’aménage aucun effort pour permettre à toutes ces survivantes des viols d’accéder à la justice quel que soit la distance.
« Quel que soit la distance qui les sépare des cours et tribunaux, il y’a des structures qui sont prévues pour leur accompagnement, orientation et stabilisation dans la communauté. Elles ont une obligation de les orienter vers la justice pour que les bourreaux répondent de leurs actes. La femme congolaise a tout intérêt à ne pas cacher une situation quelconque qui lui arrive pour qu’on puisse l’orienter vers ces organisations qui sont chargées d’appuyer et d’accompagner les victimes. Le groupement de Kalonge est tellement touché par cette situation, les victimes se cachent et pensent qu’elles ne peuvent pas atteindre la justice. Nous recommandons à toutes ces personnes de ne pas hésiter de se présenter devant ces structures qui vont les orienter vers des magistrats et avocats. Même devant les chefferies et groupement. Car le fait de garder une telle information peut ruiner la communauté. Le dossier lié aux violences sexuelles n’a pas de retard. Avoir l’argent ou pas, il y’a des projets qui sont élaborés actuellement pour remédier à cette situation. L’état congolais n’aménage aucun effort pour permettre à ces femmes de retrouver leurs sourires », déclare Jospin Bitafwanwa Mukono.
En attendant, les ONG d’accompagnement des survivantes attendent l’installation des cours et tribunaux ainsi que l’organisation des audiences foraines dans les recoins des milieux ruraux dans la province du Sud-Kivu. Cela pourrait faciliter la dénonciation et le suivi judiciaire des cas des violences sexuelles.
Grace Lola
Cet article a été produit en collaboration avec Journalistes pour les droits humains, JDH/JHR avec l’appui d’Affaires mondiales Canada.